Lire : l’HEBDOLETTRE n°110 – 29 oct. 2018
Edito de l’HebdoLettre n°110
De l’art du déconventionnement heureux
Le Sénat a entamé ses auditions en vue de préparer la loi de finances 2019. Comme chaque année, un principe dominera les débats en hémicycle : Il faut absolument faire des économies… mais sur le dos des autres, jamais du sien.
Le gouvernement a décidé de réduire la masse salariale de ses agents à l’étranger de 10 % d’ici à 2022, grâce à des gains de productivité, et en “même temps” de “maintenir l’ambition d’universalité” de notre diplomatie.
Seule l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE), dont le budget est “sanctuarisé”, échappera à cette cure d’amaigrissement. Entre 2012 et 2017, à budget constant, les dépenses de personnel de l’Agence ont augmenté de 15,5%, tandis que les dépenses du siège augmentaient de 21%. Ne me demandez pas pourquoi. Même les rapporteurs du Sénat en charge d’une mission sur l’enseignement français à l’étranger ont regretté l’absence d’explications détaillées pour le justifier.
Depuis l’adoption du plan d’orientation stratégique 2010-2013 de l’enseignement français à l’étranger, le nombre d’établissements en gestion directe (EGD) par l’AEFE a reculé de 77 à 72, et celui d’écoles conventionnées a également diminué de 166 à 155.
Dans le même temps, le nombre d’établissements “partenaires” (associations de droit privé français ou étranger ayant un accord de partenariat avec l’AEFE, limité aux questions pédagogiques et de formation des enseignants) a progressé de 217 à 269.
En réponse à l’annulation par l’État d’une partie de sa subvention, à hauteur de 33 millions d’euros pour 2017, l’AEFE a augmenté unilatéralement de 50% son prélèvement sur le chiffre d’affaires des établissements conventionnés pour 2018. Certains comités de gestion l’ont purement refusé et envisagent de mettre un terme à leur convention avec l’AEFE.
Faut-il le craindre ? Le Collège français bilingue de Londres (CFBL) a initié, début d’année 2016, un processus le conduisant à ne plus être lié par convention avec l’AEFE. Au milieu des cris d’orfraie, j’avais déclaré que je défendrais les choix du comité de gestion qui devait garantir la pérennité de l’établissement.
Le CFBL a aujourd’hui gagné son pari. Déconventionnée depuis la rentrée 2017, l’école n’a pas eu à subir l’augmentation du prélèvement de l’AEFE sur ses revenus. Les rémunérations des personnels résidents sont désormais alignés sur la même grille salariale que les autres personnels, ce qui a apaisé les tensions. Précisons que seuls deux enseignants résidents sur quinze ont quitté le collège, suite à la rupture de la convention.
Le directeur de l’école n’est plus rémunéré par l’AEFE. Il a pu demeurer à la tête de l’établissement, comme le souhaitait le comité de gestion. Du reste, le CFBL est devenu maître de tous ses recrutements. L’époque des nominations discrétionnaires de l’AEFE est révolue.
Tout aussi signifiant, l’inspection du ministère de l’Éducation britannique a élevé la classification du CFBL de “Bon avec réserves” à “Excellent”, du fait de l’amélioration de sa gouvernance.
L’avenir appartient à ces écoles “homologuées”, partenaires de l’AEFE, dont chaque élève coûte moins de 10€/an à l’État.
En 8 ans, notre réseau a progressé de seulement 36 écoles et accueilli 95.000 élèves supplémentaires.
J’ai demandé en audition, le 9 octobre dernier, à Jean-Yves Le Drian combien d’écoles françaises allaient être construites en 2019 et en 2020 (voir vidéo, ci-après). Notre ministre des Affaires étrangères m’a répondu en toute honnêteté qu’il “faudra trouver une forme originale pour passer le cap de 350.000 à 700.000 élèves (…) y compris faire émerger des demandes privées”.
Avons-nous seulement le choix ?
Mais c’est bizarre, personne ne semble remettre en question la capacité de l’AEFE à conduire ce changement.
Bizarre, j’ai dit bizarre ? Comme c’est bizarre… Découvrir l’HebdoLettre n°110
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