Lire : l’HEBDOLETTRE n°122 – 24 juin 2019
Edito de l’HebdoLettre n°122
Certificat d’existence : le désengagement permanent
Dès 2002, en France, les retraités ont pu déclarer sur l’honneur qu’ils étaient vivants pour percevoir leur pension, sans avoir à passer par la mairie pour le démontrer. Puis cette formalité a disparu, depuis que l’INSEE prévient les caisses du décès des bénéficiaires des pensions.
Les retraités français de l’étranger sont toujours traités selon la procédure datant du siècle dernier. Ils doivent faire signer un certificat d’existence par le consulat ou une autorité locale, parfois plusieurs fois par an (un certificat par caisse). Les caisses envoient leurs formulaires par la poste même dans les pays où il n’y a pas de poste !
Nos retraités se heurtent parfois à la difficulté de faire signer un document non traduit dans la langue locale à des fonctionnaires étrangers.
Ils vivent en permanence dans l’angoisse qu’on leur coupe leur pension sans préavis.
Il y a dix ans déjà à l’AFE (Assemblée des Français de l’étranger), je témoignais du problème en ces termes : “Imaginez le stress vécu par certains de nos ainés expatriés lorsqu’ils sont dans une situation d’éloignement géographique, atteints d’un handicap, affectés d’une santé fragile ou victimes d’une perte d’autonomie…” (lien).
Élu au Sénat, j’ai cru que nous pourrions toucher au but, comme ce 7 décembre 2016, lors d’une réunion que j’avais organisée avec les représentants de la Cnav, de la Sécurité sociale, de l’Agirc-Arrco et de Gip-Retraite (lire : “Certificat de vie : bientôt le bout du tunnel ?”). Mon objectif était alors de nous inspirer des accords de l’Allemagne avec d’autres pays qui l’informent automatiquement des décès de ses retraités à l’étranger.
En 2017, j’avais proposé au ministre Jean-Baptiste Lemoyne, comme à la DFAE (direction des Français de l’étranger), que la signature apposée par nos consulats fasse l’objet d’une facturation…. aux caisses de retraite. Une idée destinée à inciter les caisses à dématérialiser leurs procédures, au lieu de faire subir le coût de leur bureaucratie au MEAE et d’imposer des paperasseries d’un autre temps à nos retraités.
Dans son rapport “la Mobilité Internationale des Français” (sept. 2018), la députée Anne Genetet avait remarquablement analysé la situation de nos compatriotes retraités à l’étranger en la qualifiant de “maltraitance administrative”. Elle ajoutait que la forme actuelle des certificats “n’est plus acceptable car elle conduit à des situations désastreuses”.
Contre toute attente, au lieu de suivre ses recommandations, la direction de la sécurité sociale a émis une circulaire consternante qui dégrade encore la situation. Elle demande aux consulats de nombreux pays de cesser de signer les certificats de vie et d’orienter les usagers exclusivement vers les autorités locales.
Je veux saluer la conscience morale des consuls ou acteurs des services sociaux qui m’ont exprimé leur réticence face à cette injonction. Ils savent mieux que personne que les plus faibles, les plus âgés, les plus isolés deviendront tôt ou tard des laissés-pour-compte de notre système.
En plus de la détresse humaine, notre administration consulaire se heurte aussi à des situations ubuesques. Ainsi, dans un pays nordique, on recense deux fonctionnaires retraités. Comme il revient au consul de leur expédier leur mandat, l’administration lui demande de veiller au fait qu’ils soient toujours en vie… tout en lui interdisant, dorénavant, de signer leurs certificats d’existence.
En déplaçant le problème plutôt que de dématérialiser la procédure pour le régler, la sécurité sociale aggrave la situation pour les retraités. Elle alimente non seulement la perception du désengagement permanent vis-à-vis des Français de l’étranger mais dédaigne également l’action du Parlement. Découvrir l’HebdoLettre n°122
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