Installée au Royaume-Uni depuis trente ans, Patricia Connell est déléguée consulaire de Londres et directrice du magazine en ligne FranceInLondon.com, au service de notre communauté qui n’a cessé de croître ces dernières années.
Elle fait feu de tout bois dans les médias (voir ses interventions : BBC, Courrier international, Financial Times…) pour inciter les indécis à voter contre le Brexit, une hypothèse qui fait frémir les Français d’outre-Manche.
Au nombre de 400.000, leur influence n’est pas négligeable, d’autant que 3.000 sociétés françaises emploient près de 400.000 salariés en Grande-Bretagne.
François Gheysens : Quels sont vos liens avec le Royaume-Uni ?
Patricia Connell : Je suis mariée à un Britannique francophile depuis 35 ans. Nos trois enfants ont fait une partie de leur scolarité dans des écoles françaises à Londres et l’autre partie dans des écoles anglaises. Je tenais tout particulièrement à ce qu’ils parlent français même s’ils étaient nés en Angleterre. Pour ma part, j’ai fait mes études supérieures au Royaume-Uni, ainsi que toute ma carrière professionnelle, dans l’industrie et en agence.
Franchement, les Anglais se sont-ils jamais sentis “européens” ?
Les jeunes Britanniques se sentent européens ! Il est vrai que leurs parents et grands-parents n’ont pas forcément le même sentiment. Ils sont cependant beaucoup plus proches de l’Europe qu’on ne pourrait le penser : une grande partie d’entre eux possède une maison ou un appartement en France, en Italie, en Espagne ou ailleurs. Mais les Anglais aiment l’idée de vivre sur une île et donc d’être différents. C’est devenu une illusion : l’Eurostar et les vols bons marchés ont tout changé, surtout pour les Londoniens et les jeunes.
D’après votre ressenti, les Français de Grande-Bretagne sont-ils majoritairement pour ou contre le Brexit ?
Les Français du Royaume-Uni sont définitivement et massivement contre le Brexit. Certains sont optimistes quoi qu’il arrive, tandis que d’autres sont vraiment terrifiés à l’idée d’une sortie de l’Union. Seront-ils expulsés ? Perdront-ils leurs droits, malgré les accords en vigueur, au niveau des retraites, de la sécurité sociale ou de la reconnaissance des diplômes ? Certains Français ont tellement peur qu’ils ont demandé la nationalité Britannique !
Que risquent-ils de perdre, concrètement, en cas de Brexit ?
Si les Britanniques ont beaucoup à perdre, comme ne plus bénéficier des accords conclus par l’UE avec d’autres pays, les Français aussi. On peut citer trois risques potentiels : d’abord, l’interdiction de travailler au Royaume-Uni ; ensuite, la fin des droits à la retraite et à la sécurité sociale. Il y a, enfin, la remise en cause libre-échange qui serait catastrophique pour les entreprises françaises installées localement. Bref, en cas de Brexit, il faudrait tout renégocier et cela prendrait un temps fou !
Pourquoi vous engagez-vous personnellement en faveur du maintien dans l’UE ?
Je suis une européenne convaincue et je souhaite que l’Union Européenne soit la plus forte possible. Le malaise des Britanniques devrait être l’occasion de repenser le pacte européen en fonction des nouveaux enjeux. Mais sans le Royaume-Uni, l’Europe serait affaiblie, déstabilisée et sous la menace des partis extrémistes. Quelle angoisse !
Si les arguments de M. Cameron et des milieux d’affaires étaient recevables, cela voudrait dire qu’un vent de folie souffle sur le Royaume-Uni, au point d’égarer un électeur britannique sur deux ?
On dirait qu’un vent de folie souffle partout. L’Autriche a failli avoir un président d’extrême droite et la France pourrait bien sortir de l’UE si elle se range derrière Marine Le Pen. Poutine est aux portes de l’Europe et terrorise ses voisins, y compris des puissances comme la Suède et la Finlande. Le climat en Angleterre est la conséquence de nos politiques d’intervention hasardeuses en Irak, en Lybie ou en Afghanistan, puisque les politiciens anglais, tels que Johnson, Farage ou Gove, jouent sur la peur des migrants.
En guise de leçons à tirer, au-delà même du cas britannique, que faudrait-il réformer d’urgence dans le projet européen ?
L’Union a évidemment besoin de réformes, mais il est trop facile de prétendre que tout se décide à Bruxelles et faire semblant de ne pas participer au processus de décision. Nous siégeons tous ! Nous sommes tous représentés, en fonction du nombre d’habitants. Et parfois, représentés par des eurosceptiques comme Farage ou Le Pen. C’est un comble !
Pour finir, quel est votre pronostic ?
J’espère que les Britanniques seront nombreux à vouloir rester dans l’Union, tout comme les Ecossais ont choisi de rester dans le Royaume. A moins d’un désastre ou d’un attentat, je pronostique un vote contre le Brexit. Nous aurons cependant besoin de la mobilisation des jeunes votants qui sont majoritairement contre le Brexit.
2 Commentaires
Je suis aussi française mariée a un anglais et nous sommes fortement pour le vote rester en Europe. Je suis étonnée que dans les debats, il n’y a pas eu de discussion sur les droits des anglais qui vivent en Europe, car en Dordogne par exemple, il y a certains villages qui sont bourres d’expats. Je suis optimiste et pense que les jeunes et ceux qui écoutent leur raison feront pencher la balance pour rester en Europe. KdP
Bonjour
Je suis francaise egalement mariee a un Britannique en Grande-Bretagne depuis 18 ans et en faveur du Remain .Toutefois cette campagne est truffee de mensonges venant de ceux pour le Brexit comment se retrouver quand l’on brandit les menaces , les peurs s et le baton . Difficle d’etre clairvoyant. Situation vraiment angoissante d’avoir son destin decide par d’autres . J’ai mis en place un plan B sachant que le retour risque d’etre une grosse galere sans parler des problemes familiaux qui encourent . Alors je me dis qu’il faut faire confiance et que nous pourrons continuer a vivre dans ce pays d’adoption mais pour lequel je ne demanderai jamais la nationalite britannique . Je suis europeenne avant tout .Veronique
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