Une soirée d’exception pour un homme d’exception, voilà l’idée du consul général Edouard Braine et du nouveau conseiller culturel, Laurent Burin des Roziers, qui ont concocté un concert en l’honneur de Stéphane Hessel, sous le sceau de la fraternité universelle.
Ce 11 octobre, à l’Institut français, la prestation de Clara Cernat au violon et de Thierry Huilliet au piano fut un enchantement. Puis, Stéphane Hessel s’est avancé. D’une voix rauque mais souple, il s’est lancé dans un plaidoyer implacable en faveur de la paix. La paix est la seule réponse possible au sentiment d’insécurité d’Israël, assène-t-il. Seul en scène, debout, il a figé l’auditoire pendant une demi-heure. On a oublié qu’il avait 93 ans, et lui aussi.
Qui est Stéphane Hessel ? Un haut diplomate. Ambassadeur auprès des Nations Unies, sous Valéry Giscard d’Estaing, puis représentant de la France à la Commission des droits de l’Homme aux Nations Unies, sous François Mitterrand. Pourquoi a-t-il embrassé cette carrière ? J’ai trouvé la réponse, pleine de beauté tragique, dans la courte biographie de Stéphane Hessel rédigée par Floriane Zuniga qui fut professeur au lycée Charles de Gaulle. Je la remercie d’avoir accepté de me préparer ce superbe texte à l’intention des lecteurs de mon blog. Ainsi donc, Stéphane Hessel a choisi le Quai d’Orsay tandis qu’il était en camp de concentration pour avoir rencontré des opposants au nazisme de toutes nationalités et comprenant que les forces européennes devaient s’unir pour prévenir de nouvelles catastrophes.
Et des catastrophes, il en a vécues. Prisonnier de guerre en 1940, il s’évade pour gagner l’Angleterre. Affecté au contre-espionnage, il est envoyé en mission en France en 1944 où il sera arrêté et interrogé par la Gestapo. Déporté à Büchenwald, puis à Dora, il survit avec l’aide de la Providence et parvient à s’échapper en sautant d’un train pour rejoindre les lignes américaines à Hanovre.
L’homme est une “espèce agressive”, écrira-t-il plus tard. Il n’était pas prédestiné à le comprendre si tôt ce jeune homme de 22 ans, fou de poésie, élevé dans l’amour de l’art par des parents berlinois et protestants, venus s’installer en France en 1925. La poésie, dont il fut initié tout enfant et en trois langues par sa mère, demeura le condiment intime et indispensable de son quotidien et son ultime refuge au coeur de la barbarie. Quant à sa vie publique, il ne cessera d’intercéder pour que le plus fort épargne le plus faible, faible jusqu’à l’insignifiance parfois comme le “sans-papier” ou le “sans-logis”, dont il a porté la voix tout récemment.
Au rang de ses multiples engagements, Stéphane Hessel est membre du comité de parrainage du Tribunal Russell sur la Palestine, une forme de tribune pour mobiliser les opinions publiques au nom du droit international. Son objectif était de financer la prochaine session du tribunal à Londres du 20 au 22 novembre. Si je partage son engagement en faveur de la paix, je ne peux me résoudre à adopter une approche qui me paraît trop unilatérale à l’encontre d’Israël.
Aussi après son intervention, je suis allé saluer Stéphane Hessel, et je lui ai confié que nous avions assurément une foi commune que je résumerai par cette formule de Victor Hugo : “Ceux qui vivent sont ceux qui luttent”. Au delà, je ne soutiens plus la comparaison avec un tel personnage.
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