L’UFE GB, l’Union des Français de l’étranger de Grande-Bretagne, a organisé jeudi 2/05/13 sa 5ème réunion publique annuelle sur le plan Ecole. J’ai co-animé la réunion avec Sophie Routier, en charge du pôle Enseignement au sein de l’UFE GB et membre du Board du collège français bilingue de Londres (CFBL).
Fidèle à mon engagement pris lors du lancement du plan Ecole, en juin 2008, cette réunion publique permet d’évaluer chaque année les progrès de cette action collective en faveur du développement de l’enseignement français au Royaume-Uni et d’en débattre avec tous ceux qui le souhaitent (lire : Texte Intervention OC 19 06 2008 d’Olivier Cadic, lors de la rencontre-débat UFE GB du 19 juin 2008 – ficher pdf).
Je remercie Sabine Paradis et Isabelle Faulkner co-fondatrices de l’EIFA (Ecole Internationale Franco-Anglaise) de nous avoir permis d’organiser notre dernière rencontre dans leurs locaux flambant neufs. Cette nouvelle école londonienne ouverte en janvier 2013 accueillera déjà plus de cent dix élèves dès la rentrée de septembre 2013. L’ouverture de l’EIFA marque l’arrivée à Londres de la Mission laïque française (MLF), deuxième opérateur français éducatif dans le monde dont le slogan est «deux cultures, trois langues».
En 2008, notre objectif initial était de créer 1500 places nouvelles dans l’enseignement français sur une période de trois ans, au rythme de 500 créations annuelles, pour s’ajuster au volume de la demande insatisfaite de l’époque. Le plan Ecole vise donc à trouver les moyens d’accroître l’offre par une démarche maitrisée et constante. Cinq ans plus tard, nous pouvons revendiquer la création de 955 places, soit une moyenne de 200 unités supplémentaires par an et une augmentation de 21% de la capacité d’accueil des établissements.
Nous sommes encore loin de l’objectif initial.
Toutefois, il faut saluer le travail accompli avec la création du Collège français bilingue de Londres (CFBL) à Kentish Town et l’ouverture programmée à Brent, près de Wembley, d’un établissement qui représentera à la fois un troisième collège et un second lycée à Londres, en septembre 2015. Forts de ces succès, qui rompent avec les années d’immobilisme, la mise en œuvre du plan Ecole fournira bien les 1500 places promises, au bout de sept ans certes, au lieu de trois…
Il faut se réjouir de tels progrès et je rends un vif hommage à tous ceux qui s’impliquent au quotidien dans le cadre du plan Ecole.
Nous devons également faire preuve d’humilité en considérant l’écart entre le résultat obtenu et le besoin non satisfait exprimé chaque année par les parents d’élèves. Environ 700 demandes ont été rejetées lors de la dernière rentrée. En interne l’AEFE parle de “taux de pression” sur les établissements quand les demandes d’inscription ne sont pas honorées. J’ai réclamé la communication de ces données en conseil d’administration à de nombreuses reprises… sans succès.
La frustration de centaines de familles qui ne trouvent toujours pas la possibilité de s’inscrire dans le réseau français s’exprime avec force et nous devons y être particulièrement sensibles.
Il va bien falloir débattre un jour des raisons profondes qui brident la capacité d’accueil de notre réseau d’enseignement à l’étranger. Une nouvelle circulaire du ministère de l’Education nationale du 10 avril 2013 prévoit que l’homologation d’une nouvelle école sera sujette à l’avis favorable du MAE (ministère des Affaires étrangères), auquel s’ajoute désormais l’avis de l’AEFE (Agence pour l’enseignement français à l’étranger). Lien vers la circulaire : www.education.gouv.fr/pid25535/bulletin_officiel.html?cid_bo=71388
Or, l’AEFE est un établissement public national placé sous la tutelle du ministère des Affaires étrangères. Elle pilote le réseau d’enseignement français à l’étranger, en charge notamment de fournir les personnels détachés par l’Education nationale. Mais elle demeure aussi le principal opérateur de ce réseau composé de 480 établissements. A l’image du lycée Charles de Gaulle de Londres, 75 de ces établissements sont gérés directement par l’Agence (les “établissements EGD”), tandis que 156 écoles ont passé une convention avec l’AEFE (les “établissements conventionnés”), comme le CFBL ou Jacques Prévert, alors que tous les autres, soit 249 écoles, sont désignés comme “établissements partenaires”.
Peut-on être juge et partie ? N’y a-t-il pas un conflit d’intérêt à piloter un réseau dont on est le principal opérateur ?
Anne-Marie Descôtes, directrice de l’AEFE, nous avait laissé entendre que Londres ne saurait constituer une priorité pour l’AEFE lors de sa première visite au Royaume-Uni, le 14 novembre 2008.
C’est la raison pour laquelle, soulignons-le, le conseiller culturel adjoint a fait appel à la MLF (Mission laïque française) pour nous aider alors à créer le business plan et à monter le projet du CFBL. Une fois le plan bouclé, le bâtiment trouvé et le financement assuré, l’AEFE a pris la décision de devenir l’opérateur de ce nouvel établissement, et conservé son monopole sur l’enseignement secondaire à Londres. Clairement dit, sans le poste diplomatique et la MLF ce dossier n’aurait jamais abouti.
Pour l’EIFA, le cycle était le même. L’AEFE a tenté de décourager Sabine Paradis dans son projet. Soutenue par la MLF et les conseillers culturels adjoints, représentants locaux du MAE, la tenacité de Sabine a fini par payer. Lorsque l’EIFA a pu voir le jour, elle est restée loyale envers la MLF et a éconduit l’AEFE. Là encore sans l’action combinée du poste diplomatique et de la MLF, plus de 100 places nouvelles n’auraient pas vu le jour.
Revenons à la circulaire. En ayant la possibilité de contrôler dorénavant ce qui peut être homologué ou non, l’AEFE dispose d’un pouvoir exorbitant, celui d’empêcher la naissance de toute concurrence !
C’est une régression inacceptable pour tout républicain qui se respecte.
Depuis un an, le gouvernement socialiste légitime un retour vers un dirigisme insidieux et anachronique. L’opacité règne désormais à tous les niveaux. Les personnels de direction détachés me confient parfois leur malaise face aux pressions qui pèsent sur leur avenir professionnel s’ils ne font pas preuve de docilité. C’est navrant.
Afin d’apporter un nouvel élan au développement de notre enseignement à l’étranger, il faut
absolument découpler l’action de l’AEFE qui devrait se concentrer sur sa mission de pilotage
et, par conséquent, abandonner son rôle opérationnel, au profit d’acteurs tels que la MLF ou
divers organismes privés ou même publics étrangers.
La MLF a démontré sa souplesse, sa capacité d’adaptation à prendre en compte les besoins des familles françaises tout en valorisant la culture et la langue des pays d’accueil. Elle necessite moins d’argent public car sa structure et son mode de fonctionnement sont plus légers.
Nous devons garantir la liberté d’établissement de structures qui contribuent au rayonnement de la France à l’étranger et cesser de mettre des barrières à l’entrée de toutes les bonnes volontés!
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