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Sénat – Pérou – Premier ministre

(g à d) Rolando Ruiz Rosas, Jean Hingray, Gustavo Adrianzen et Olivier Cadic

Ce fut un grand honneur de recevoir au Sénat, ce 11 décembre, Gustavo Adrianzen, président du Conseil des ministres du Pérou, et Rolando Ruiz Rosas, ambassadeur du Pérou en France. Pour les accueillir, j’étais aux côtés de Jean Hingray, président délégué pour le Pérou, au sein du groupe d’amitié France-Pays andins.

Cet entretien nous a permis d’évoquer plusieurs sujets d’intérêt commun, au premier rang desquels le narcotrafic. Le président du Conseil des ministres a détaillé la stratégie policière, militaire, mais le volet économique et social mise en œuvre dans son pays pour lutter contre ce fléau, soulignant notamment les retombées positives de la politique de substitution de cultures agricoles (cacao, café…) qui a contribué à la baisse de la production illégale de feuilles de coca en 2023 et 2024.

Les défis à relever restent néanmoins nombreux, notamment pour enrayer le trafic dans les zones difficiles d’accès d’Amazonie, le blanchiment d’argent dans des exploitations minières illégales et les exportations illicites depuis les aéroports et ports péruviens – le nouveau mégaport de Chancay, construit par le géant chinois du transport maritime Cosco, devra à cet égard être particulièrement surveillé. Des scanners sont attendus en provenance des Etats-Unis pour vérifier les containers, nous a précisé Gustavo Adrianzen.

Avec Jean Hingray, nous avons souligné que les pays consommateurs, comme la France, devaient aussi assumer leur part de responsabilité, et plusieurs pistes de collaboration ont été évoquées : aide à la formation de chiens policiers, fourniture de technologies dont le Pérou n’est pas doté (drones et radars), soutien potentiel de l’Agence française de développement sous l’angle de la protection environnementale de l’Amazonie, etc.

Les enjeux liés à la cybersécurité ont également animé les échanges. Le Pérou et la France font le même constat d’un renforcement nécessaire des moyens dédiés à la préservation de leurs intérêts face aux risques croissants de cyberattaques.

Le sujet préoccupe particulièrement le Pérou, après les révélations récentes concernant le vol des données personnelles et financières des clients d’un grand groupe bancaire, ainsi que des tentatives d’intrusions informatiques visant des intérêts publics.

Nous avons aussi fait état des travaux en cours de la commission spéciale que je préside, chargée d’examiner un projet de loi relatif à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité, par le biais de la transposition de trois directives européennes.

Médias – “Le trafic de stupéfiants, un marché en plein essor ?” (TV5 Monde – 05 déc. 2024 – Vidéo)

Merci à Demet Korkmaz qui m’a invité, ce 5 décembre, sur le plateau de son émission « 7jours » (TV5 Monde) pour comprendre pourquoi le trafic de stupéfiants était un marché en plein essor et savoir si l’Europe était en voie de « mexicanisation ».

Cette émission m’a permis de rappeler qu’il faut prendre la question de façon globale, c’est-à-dire à la source, puisque pays-producteurs et pays consommateurs, nous sommes les deux faces d’une même pièce. La production, le transport, la distribution et puis le retour de l’argent et son blanchiment, c’est toute une industrie qui est en marche, avec ses spécialistes. S’attaquer à un seul maillon de la chaine, comme les points de vente, est inopérant, sauf si on veut faire un coup médiatique.

Autre difficulté, la drogue est un marché qui évolue constamment. Les criminels s’orientent aujourd’hui vers des drogues synthétiques, comme le fentanyl, dont les effets sont ravageurs. Comme on dit aux Etats-Unis « One pill can kill ». Cette nouvelle forme de menace devient celle que nous craignons le plus.

voir la VIDÉO (à partir de 8’15)

J’ai répondu aux questions suivantes de Demet Korkmaz :

. Le marché de la drogue est estimé en Europe à 31 milliards d’euros. Olivier Cadic, qu’est-ce qui explique cette explosion du trafic de drogue, car d’année en année on atteint des records ?

. Quand la drogue prospère, la violence aussi. Aucune ville aujourd’hui n’est épargnée en France ou en Europe. Pourtant les pouvoirs publics, jusqu’à lors, n’ont pas été très présents sur ce sujet-là ?

. Si les pays européens ont échoué face à cette déferlante de la drogue, est-ce que c’est un manque de coordination ou un manque de moyens ?

. J’imagine qu’il faut aussi harmoniser les règles au niveau européen, parce que si un pays européen applique une règle judiciaire ou policière et que ce n’est pas la même chose chez nos voisins, cela complique aussi l’équation ?

. Vous vous êtes rendu en Amérique latine pour vous rendre compte de ce que représente ce marché, que vous disent vos homologues sur place ?

. La Chine est-elle un nouvel acteur dans ce trafic de drogue ?

Voir la vidéo sur le site TV5 Monde

Médias – « Mexicanisation » ou « Marseillisation » ? (Le Temps – Suisse – 08 nov. 2024)

Paul Ackermann, correspondant du journal suisse Le Temps, m’a donné l’occasion de partager mon appréciation au sujet de la lutte contre le narcotrafic en France à l’heure où se multiplient les déclarations chocs.

Je souhaite  relativiser la situation en France, car certains abus de langage font souffler un vent de panique, et omettent d’engager une action résolue et coordonnée à l’échelle internationale face à un phénomène transnational, par nature.

Extraits

Relativiser les chiffres

Le sénateur centriste Olivier Cadic, vice-président de la commission d’enquête, note que tout a démarré à Marseille. « Puis ça s’est organisé, nous avons montré que cette problématique se propageait, puisque c’est une façon de faire de l’argent rapide avec un marché qui s’étend et des connexions internationales avérées », explique-t-il.

« Il ne faut pas laisser la situation dériver davantage et les propositions de la commission sont positives dans ce sens », ajoute l’élu. Mais Olivier Cadic tient à relativiser les chiffres: « En France, on a moins de 1000 homicides par an pour une population de 68 millions d’habitants, c’est un chiffre qui a été divisé par deux sur vingt ans. Si on constate que ce chiffre augmente légèrement, il faut agir. Mais je me demande quel est l’objectif du ministre de l’Intérieur quand il parle de « mexicanisation ». Notre situation n’a rien à voir avec celle du Mexique. La France reste un pays sûr, on a un Etat qui fonctionne, avec une police qui peut agir. Le rôle du ministre devrait être de montrer qu’il est au travail, de proposer des solutions et de rassurer la population, pas de créer la panique. Il faut se fier à la réalité du terrain. Si on faisait un journal télévisé pour chaque mort sur la route, les gens ne prendraient plus la voiture. » En 2023, année record, la police a comptabilisé 139 meurtres liés au narcobanditisme, dont une cinquantaine à Marseille. Pendant ce temps, 3167 personnes perdaient la vie dans des accidents de la route.
[…]
Quant à l’insistance sur les campagnes de communication et la culpabilisation du consommateur via des peines de prison, pour Olivier Cadic, ce serait « une façon de se déresponsabiliser », d’autant qu’il n’y a déjà pas assez de places de prison pour tous les trafiquants. Le sénateur déplore le fait que le problème ne soit pas appréhendé plus globalement, avec notamment une approche européenne, « parce qu’on voit bien que les Néerlandais, les Belges et les Espagnols sont aussi confrontés » à ces problèmes. « Envoyer la police faire la chasse aux fumeurs de joints », comme le préconise le RN et dans une moindre mesure le ministre de l’Intérieur, « ce n’est pas la solution », a lui aussi estimé sur RTL l’eurodéputé star du centre gauche Raphaël Glucksmann.

Lire l’article sur le site du média Le Temps « Mexicanisation » ou « Marseillisation » ?

Médias – “Narcotrafic : La France en voie de mexicanisation ?” (Public Sénat – 04 nov. 2024 – Vidéo 12’50)

Animée par Thomas Hugues, j’ai participé à l’émission Sens Commun (Public Sénat) consacrée au narcotrafic en compagnie de Magali Lafourcade, magistrate et secrétaire générale de la CNCDH, et de Driss Aït Youssef, docteur en droit public et spécialiste des questions de sécurité.

Une occasion de mettre les chiffres en perspective, de souligner qu’une vision hexagonale dans la lutte contre narcotrafic était une impasse, et qu’il faut privilégier une politique basée sur des objectifs clairs en valorisant les résultats de nos forces engagées sur le terrain au péril de leur vie face à des criminels prêts à tout.

La dimension internationale du problème doit conduire à miser sur la coopération internationale. Thomas Hugues a mentionné mon récent déplacement en Bolivie, où j’ai assisté à la destruction des laboratoires clandestins dans la jungle. J’ai rappelé que la Chine était aux deux bouts de la chaine de valeur : de la production de précurseurs chimiques pour la cocaïne et les drogues de synthèse jusqu’à la facilitation du blanchiment, comme à Hong Kong où les autorités ne donnent suite à aucune demande d’information.

VP de la commission d’enquête sénatoriale sur « l’impact du narcotrafic en France et les mesures à prendre pour y remédier », j’ai soutenu lors de nos travaux que les pays-producteurs et les pays-consommateurs n’étaient que les deux faces de la même pièce et que se battre contre le narcotrafic devait nous conduire isoler les narco-États (lire).

Mes interventions durant l’émission :

Voir l’émission dans sa totalité sur le site Public Sénat : Narcotrafic : La France en voie de mexicanisation ?

Public Sénat :
« L’hyperviolence des trafiquants de drogue touchent désormais des villes comme Poitiers, Rennes ou Blois… Le constat d’une France submergée par le narcotrafic a été posé par une Commission d’enquête du Sénat en mai dernier. Six mois plus tard, le nouveau Ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, veut responsabiliser les consommateurs « vous… qui fumez des joints, qui prenez des rails de coke, il a le goût des larmes et surtout du sang ». Faut-il sanctionner plus lourdement les consommateurs ou au contraire légaliser le cannabis pour priver les dealers d’une partie de leurs revenus ? Comment sortir de ce que certains appellent la “mexicanisation” de la France ?

En circonscription au Bolivie (2/3) – Cochabamba – Chimore – Villa Tunari (16 mai 2024)

Lors de notre rencontre à La Paz organisée par Hélène Roos, ambassadrice de France, ce lundi, Eduardo Del Castillo, ministre de l’Intérieur de Bolivie, m’a invité à assister à une journée d’action des forces anti-drogue boliviennes dans la jungle amazonienne (Isiboro Secure National Park and Indigenous Territory).

Accompagné par Martine Vellard, attachée de sécurité intérieure, j’ai assisté à la destruction de deux laboratoires fabriquant la chlorhydrate de cocaïne et une piste d’atterrissage clandestine.

Lutte contre le narcotrafic

Ce 16 mai, les forces spéciales nous ont récupéré à notre hôtel à Santa Cruz pour nous permettre d’être héliporté jusqu’à la base militaire de Chimore (département de Cochabamba, province de Chapare), où j’ai retrouvé Eduardo Del Castillo.

Première séquence, un briefing de l’opération Bufeo, sur 3 jours, prévoyant la destruction de 5 laboratoires de production de cocaïne chlorhydrique et de deux pistes d’aviation clandestines.

Un hélicoptère nous a alors transportés en 20 minutes dans la commune de Villa Tunari, où nous avons embarqué pour remonter une rivière durant 30 minutes.

Puis après 15 minutes de marche dans la jungle, nous avons atteint le premier laboratoire fabriquant la chlorhydrate de cocaïne à partir de la pâte base de cocaïne. Sa capacité de production était de 85 kilos par jour.

J’ai pu constater l’ingéniosité des trafiquants pour camoufler dans la jungle leurs ateliers de production, espaces de stockage des produits chimiques venant de Chine qui composent à 70% la cocaïne, lieux de vie pour la restauration, le repos, l’hygiène…

Il faut compter 200 000 dollars d’investissement pour construire un tel laboratoire qui s’étend sur un hectare.

Le cylindre qui utilise l’éther pour la distillation est nommé le réacteur “muerto (mort)”. Les trafiquants baptisent l’aire de distillation et de purification sous le nom de “discothèque”.

Lorsque l’armée bolivienne l’a fait sauter, je me suis réjouis que la fête soit finie.

Le transfert bateau – hélicoptère – bateau nous a pris une heure pour parvenir au second laboratoire, capable de produire quotidiennement 120 kilos de chlorhydrate de cocaïne.

C’est là que le ministre de l’Intérieur a souhaité donner une conférence de presse pour annoncer l’opération de destruction qui a fait perdre plus d’un million de dollars d’investissement aux narco trafiquants.

J’ai témoigné de notre reconnaissance envers les forces boliviennes d’assurer le combat en première ligne dans cette guerre du narcotrafic.

Après la destruction de l’endroit, nous avons repris l’hélicoptère pour assister à la destruction d’une piste d’atterrissage depuis les airs. Le trou béant produit au milieu de la piste ne permettra plus aux petits avions de venir emporter leurs cargaisons vers le Brésil ou le Paraguay voisins.

Le retour à Chimore m’a permis de saluer les forces de l’Umopar qui ont préparé et réalisé cette opération de main de maître et d’exprimer toute ma gratitude à Eduardo Del Castillo.

Cette journée exceptionnelle restera gravée à jamais dans ma mémoire.

Je retiendrai assurément la détermination de l’ASI, Martine Veillard, pour détruire les micro-ondes des trafiquants à coups de marteau, tout comme le sourire des militaires boliviens devant le ministre en rendant compte de leurs succès.

Je plaide pour que la France s’engage pleinement à leurs côtés, car ils constituent la première ligne de défense dans la lutte contre les narco trafiquants. +d’images

CE Narcotrafic : pays-producteurs et pays-consommateurs sont les deux faces de la même pièce

Ce 14 mai, notre commission d’enquête sénatoriale sur « l’impact du narcotrafic en France et les mesures à prendre pour y remédier » présentait ses conclusions à la presse par la voix de son président Jérôme Durain et de son rapporteur Étienne Blanc.

Lors de la présentation du rapport devant notre commission, j’ai fait une déclaration sur le texte proposé, après avoir fait adopter 5 modifications :

Ma déclaration

Pays-producteurs et pays-consommateurs sont les deux faces de la même pièce

Je veux féliciter notre président, notre rapporteur, et toute l’équipe qu’ils ont emmenée pour ce travail formidable, alarme nécessaire pour que chacun prenne conscience de l’ampleur du défi et de la tâche. J’appelais de mes vœux une telle entreprise depuis des années. Le ministre de l’Économie a fait un lien entre le narcotrafic et le terrorisme ; ce lien, je l’ai constaté sur le terrain, avec l’implantation du Hezbollah au Venezuela et les attentats subis par la Colombie. D’autres liens encore se créent, avec le trafic des migrants, le trafic d’armes, ou encore la cybercriminalité. Tous ces crimes ont pour trait d’union le blanchiment. Le crime organisé a ses spécialités, mais on affronte aussi des généralistes du crime, ce que le travail de notre commission a mis au jour.

Ma collègue Marie-Arlette Carlotti disait que le travail était peut-être trop important ; malheureusement, il me semble au contraire que la tâche est tellement immense qu’un tel travail ne peut être exhaustif. On aurait pu évoquer les routes de trafic de l’Afrique de l’Est, mais cela aurait exigé encore bien des auditions, et nous avons déjà démontré l’essentiel. Un travail plus important encore pourrait aussi être mené sur la Chine et Hong Kong, véritables trous noirs du blanchiment.

Mon regret est peut-être que les trois recommandations essentielles du rapport sont à portée nationale (Lire). Or, les pays consommateurs, auxquels nous appartenons, et les pays producteurs se renvoient la balle alors qu’ils sont deux faces de la même pièce. Avec tous ceux qui veulent se battre contre le narcotrafic, nous devons isoler les narco-États. Voilà la vision internationale que je défends ; ce prisme me vient naturellement de mon expérience en tant que membre de la commission des Affaires étrangères. Mais je comprends bien que le présent travail a été suscité par une perception nationale du problème et, au vu de sa qualité et de l’écoute dont ont fait montre le président et le rapporteur, je soutien ce rapport.

Mes 5 amendements

. La présentation qui est faite du Venezuela dans le projet de rapport me gêne quelque peu ; le changement d’ambassadeur de ce pays y est interprété comme une reconnaissance de l’élection de Nicolás Maduro. Je serais heureux si ma proposition de modification n° 1, visant à y remédier, était adoptée.

. La proposition de modification n° 2 porte sur le contrôle des précurseurs chimiques de drogues de synthèse, qui proviennent essentiellement de Chine. Il convient de prendre note des annonces faites par le ministre de l’intérieur lors de son audition par la commission d’enquête. Je crains que, d’ici quelques années, on observe en Europe l’évolution constatée aux États-Unis en la matière.

. La proposition de modification n° 3 vise à ajouter des précisions sur la situation politique vénézuélienne et la fermeté nécessaire face à l’inaction du gouvernement vénézuélien contre le trafic de drogue. On espérait l’an dernier que l’élection présidentielle dans ce pays rendrait Nicolás Maduro plus accommodant, mais on constate aujourd’hui qu’il persévère. Le Venezuela est considéré par beaucoup comme un narco-État ; les États-Unis offrent d’ailleurs 15 millions de dollars pour tout renseignement pouvant conduire à l’arrestation de M. Maduro.

. La proposition de modification n° 4 vise à préciser que la coopération judiciaire et policière doit être développée non seulement avec la Colombie et le Venezuela, mais aussi avec l’ensemble des pays de la zone affectés par le narcotrafic. Je me rends cette semaine au Pérou et en Bolivie ; tous ces pays réclament une coopération internationale plus poussée.

. Enfin, la proposition de modification n° 5 concerne le renforcement de la clause européenne dite « attrape-tout » (catch-all) pour les précurseurs chimiques, dans le prolongement de l’audition du ministre de l’intérieur. Il me semble important de faire état des propositions avancées dans ce domaine. Il est impossible d’être exhaustif au vu de la taille du problème auquel nous sommes confrontés, mais des propositions doivent être faites pour mieux lutter contre l’arrivée sur notre territoire des précurseurs chimiques.

Ressources :

> LES TROIS PRINCIPALES RECOMMANDATIONS DE LA COMMISSION D’ENQUÊTE (1p) LIEN
> LES 35 RECOMMANDATIONS DE LA COMMISSION D’ENQUÊTE (12p) LIEN
> L’ESSENTIEL : UN NÉCESSAIRE SURSAUT : SORTIR DU PIÈGE DU NARCOTRAFIC (20p) LIEN
> RAPPORT au nom de la commission d’enquête sur l’impact du narcotrafic en France et les mesures à prendre pour y remédier (591p) LIEN
> CONCLUSIONS de la commission d’enquête par Jérôme DURAIN et Étienne BLANC de 14 mai 2024 au Sénat (1h15) VIDEO

CE Narcotrafic – Réponse de Bruno Le Maire sur Hong Kong, trou noir du blanchiment – Vidéo Q/R (2’07)

Ce 26 mars, notre commission d’enquête sénatoriale sur le narcotrafic a auditionné Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique.

J’ai interrogé notre ministre sur le blanchiment d’argent et plus particulièrement sur Hong Kong, porte d’entrée financière vers la Chine que j’ai qualifiée de trou noir du blanchiment.

« Je confirme totalement les propos du sénateur », m’a répondu Bruno Le Maire, en concluant que « Hong Kong, c’est effectivement une autre paire de manches, pour parler simplement ».

Par ailleurs, le ministre s’est félicité du fonctionnement efficace de l’accord de coopération avec les Émiratis pour identifier les avoirs.

VERBATIM de mon intervention

Je voudrais revenir sur la lutte contre le blanchiment. Elle est internationale. Le blanchiment ne fonctionne pas que pour le trafic de drogue, on l’a vu : le terrorisme, le trafic d’êtres humains, la cybercriminalité, l’évasion fiscale, le contournement des sanctions internationales… Cela nous a été dit lors d’auditions : nous sommes face un blanchiment à grande échelle avec des groupes criminels qui fonctionnent à grande échelle, des systèmes de compensation, des systèmes occultes basés sur la confiance, la cryptomonnaie, etc. On a évoqué bien sûr comme place, Dubaï, souvent, par certains, en mettant en avant quand même qu’un travail est en cours : la nomination d’un magistrat de liaison, qu’il y avait de la communication. Par contre, lors de nos auditions concernant Hong Kong, il nous a été dit qu’il n’y avait jamais de réponse des autorités locales sur les demandes pour traquer les trafiquants. Justement, dans ce domaine, j’étais à Washington il y a très peu de temps. J’étais auditionné par le département de Justice et ils sont eux-mêmes dans une situation identique. Donc, ce n’est pas nous qui sommes en situation de faiblesse, apparemment, c’est international. Hong Kong est la porte d’entrée financière vers la Chine. C’est devenu le trou noir du blanchiment. Comment tracez-vous la qualité des fonds qui reviennent de Chine pour s’investir en France ? Avez-vous mis en place des mesures de lutte anti-blanchiment depuis cette origine ?

VERBATIM de la réponse de Bruno Le Maire

S’agissant de Hong Kong et de la coopération internationale, c’est évidemment un des enjeux à venir. Il faut plus de transparence entre les états. Il faut éviter l’opacification. Il y a un certain nombre d’états avec lesquels c’est plus compliqué. L’enjeu d’Hong-Kong est réel. Je confirme totalement les propos du sénateur. La coopération internationale, en règle générale, a fonctionné de manière efficace. Nous avons signé un accord de coopération avec les Émiratis pour identifier les avoirs. Donc, avec les EAU les choses fonctionnent bien. Hong Kong, c’est effectivement une autre paire de manches, pour parler simplement.

CE Narcotrafic – Gendarmerie nationale – Prévention & Nouvelles technologies – Vidéo Q/R (3’55)

Ce 18 mars, notre commission d’enquête sénatoriale sur le narcotrafic, présidée par Jérôme Durain, a auditionné Christian Rodriguez, général d’armée, directeur général de la Gendarmerie nationale.

L’occasion pour la commission de saluer le remarquable travail de terrain de la Gendarmerie dans la lutte anti-drogue et l’implication personnelle de ses responsables, comme nous avons constaté lors de nos travaux.

J’ai évoqué le sujet de la prévention et celui de la LAPI (Lecture automatique de plaques d’immatriculation).

A propos de la prévention, « c’est plus simple d’empêcher que de réparer après, donc, je partage complètement votre avis », m’a répondu le général, rappelant qu’il disposait de 600 formateurs anti-drogue qui vont dans les écoles.

Concernant la LAPI, il a commencé par regretter que « cela fait 10 ans qu’on essaye d’avancer sur la mise en commun des LAPI Douanes, Police, Gendarmerie pour pouvoir utiliser les données ». Le général a conclu en se déclarant évidemment « partant pour ce genre de solution ».

VERBATIM de mon intervention

Deux sujets. Un, la prévention. Enfant, je me souviens de mon premier contact avec un gendarme qui était entré dans la salle de classe pour nous informer sur la prévention routière. Notre commission était à Marseille et nous avons évoqué ce sujet dans une école. Y avait-il des cours de prévention, de sensibilisation aux effets du trafic ? Effectivement, on nous avait dit qu’à Marseille, dès le CM1, CM2, la Police avait mis en place un centre de loisirs pour les jeunes et faire de la prévention. Je voulais savoir si au niveau de la Gendarmerie vous aviez quelque chose dans ce domaine et si vous pouviez nous partager des statistiques.

Puis, un deuxième sujet qui, je pense, saura retenir l’attention du technologue que vous êtes aussi. Au Brésil, la Police de la route a une formidable efficacité parce qu’ils ont connecté l’intelligence artificielle au système de lecture automatique des plaques d’immatriculation. Cela leur permet d’anticiper, de détecter les véhicules automatiquement par ordinateur, de flaguer certaines plaques d’immatriculation pour les classer en « orange ou rouge » si elles ont des parcours suspects. Ce dispositif facilite les arrestations et la lutte contre le crime organisé. Je voulais savoir ce que vous en pensiez, parce que vraisemblablement cela nécessiterait de faire des propositions dans le rapport, si ce système vous séduisait.

CE Narcotrafic – La commission d’enquête à Marseille

Durant deux jours (7-8 mars), notre commission d’enquête s’est rendue à Marseille.

Toutes les personnes auditionnées ont manifesté leur satisfaction que le Sénat se soit emparé de ce sujet.

Communiqué de presse

Déplacement de la commission d’enquête sur le narcotrafic à Marseille

Créée en novembre 2023, la commission d’enquête du Sénat sur l’impact du narcotrafic en France et les mesures à prendre pour y remédier poursuit ses travaux.

Elle se rendra, les 7 et 8 mars 2024, à Marseille. Dans le prolongement des précédents déplacements de la commission en Seine-Saint-Denis, à Verdun et Commercy, en Bourgogne et à Lyon, le président Jérôme Durain (socialiste, Saône-et-Loire) et le rapporteur Etienne Blanc (Les Républicains, Rhône) y rencontreront notamment les élus locaux, les forces de sécurité intérieure et les magistrats.

Avec 49 « narchomicides » en 2023, la ville de Marseille apparaît aujourd’hui comme un des symboles les plus importants de la violence liée au trafic de drogue.
Victimes collatérales, tueurs de plus en plus jeunes – plus de 60 % des mis en cause ont moins de 21 ans selon les chiffres présentés par le procureur de Marseille –, habitants désespérés : certains craignent que la situation marseillaise n’illustre une évolution nationale.

Plus encore qu’ailleurs, l’efficacité de la réponse pénale face à cette violence effarante déployée par les trafiquants interroge, malgré une mobilisation exemplaire des forces de sécurité et du monde de la justice. À cet égard, la commission se penchera également sur le bilan de la stratégie de harcèlement des points de deal menée depuis 2020.

La commission portera enfin une attention particulière, lors de son déplacement, à la réalité vécue par les habitants, premières victimes d’un trafic qui n’épargne aucun territoire, aucune classe sociale, aucune génération. Elle tentera d’identifier les causes du sentiment d’abandon de la population face à une gangrène qui ne cesse de s’étendre, mais aussi de mettre au jour des solutions reposant sur la mobilisation des acteurs au niveau local.

Dans l’attente de la présentation du nouveau « plan stups », des failles importantes demeurent dans la réponse de l’État, comme s’il n’avait pas pris la mesure de la menace que le narcotrafic représente non seulement pour la santé et la tranquillité publique, mais aussi pour la cohésion de notre société et les intérêts fondamentaux de notre pays. Face à l’urgence, qui n’est nulle part aussi évidente qu’à Marseille, un véritable sursaut s’impose.

Le rapport de la commission d’enquête sera rendu public au mois de mai 2024.

Un point presse d’étape sera organisé par la commission d’enquête Jeudi 7 mars 2024 à 18h45 à la Préfecture de police des Bouches-du-Rhône.

CE Narcotrafic – Corruption dans l’Administration – Vidéo Q/R (10’30)

Ce 12 février, notre commission d’enquête sur « l’impact du narcotrafic en France et les mesures à prendre pour y remédier », présidée par Jérôme Durain, a auditionné trois responsables de l’inspection de l’Administration, de la Justice et des Finances.

Dans le cadre de la lutte contre le narcotrafic en France, quels sont les dispositifs mis en place dans nos administrations pour lutter contre la corruption dite de basse intensité, fondée sur les atteintes à la probité, la prise d’intérêt personnel ou bien encore l’organisation de trafics.

Suite à mon intervention, je tiens à remercier pour leur réponse :
. Michel Rouzeau, chef du service de l’inspection générale de l’administration, qui a évoqué la question de la délivrance des visas, abordant au passage l’expérimentation de la délivrance à distance des passeports aux Français de l’étranger, sujet sur lequel j’ai répliqué.
. Christophe Straudo, chef de l’inspection générale de la justice, qui s’est prononcé sur la situation de la corruption en France, en indiquant que « l’expertise française en matière de déontologie, de détection des manquements est citée comme exemple », sur un plan international.
. Julien Senèze, chef du pôle audit de l’inspection générale des finances, qui m’a répondu sur le thème de la vertu qu’il appelle pour sa part « la culture anti-corruption ».

VERBATIM de mon intervention

J’ai été très intéressé par votre approche de la prévention par la formation, la déontologie. Je représente les Français établis hors de France et j’ai un regard un peu inversé. A propos de prévention et de formation, on voit aujourd’hui qu’en Amérique latine, les cartels commencent à financer les études des jeunes qui seront plus tard des magistrats ou des officiers de police, c’est vous dire les problématiques nouvelles qui vont nous arriver. Un expert a décrit ici devant la commission comment certains officiers de police en Amérique latine n’ont pas le choix : ils acceptent la corruption ou c’est la mort. Cela explique un certain nombre de problématiques. Nous avons encore un état fort chez nous et il faut donc éviter d’en arriver là, mais on voit jusqu’où cela peut aller.

Vous avez parlé de corruption sous pression. C’est ce qu’on observe à l’extérieur pour les visas dans les consulats et on a même eu des cas tragiques, encore l’année dernière, de personnes qui avaient effectivement accepté et qui sont parties dans un cycle sans pouvoir revenir en arrière. J’ai donc été très sensible à ce que vous avez dit sur le fait qu’on doit proposer des choses à quelqu’un qui a fauté, l’aider à revenir en arrière, c’est mieux que de le laisser dériver.

J’aurais bien aimé comprendre quelles sont les données, en tendance, en matière de corruption et comment on se situe par rapport aux autres pays européens. Est-ce qu’il y a quelque chose de particulier en France ou pas ? Est-ce que nous sommes dans une norme dans notre environnement ?

Un attaché de sécurité intérieure m’a dit une chose intéressante dans un échange. Il m’a dit : il faudrait peut-être encourager la vertu, plutôt que le contrôle. Alors, si on devait encourager la vertu, comment pourrions-nous imaginer cela ?

CE Narcotrafic – Les réponses du Quai d’Orsay face au narcotrafic – Vidéo Q/R (8’15)

Précurseurs chimiques chinois – Influence chinoise sur le narcotrafic au Pérou – Blanchiment et mines d’or illégales au Venezuela – Chiffres de la criminalité en Amérique latine.

Ce 22 janvier, notre commission d’enquête sénatoriale sur le narcotrafic a auditionné les responsables du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères afin de d’apprécier l’impact du narcotrafic sur la politique étrangère de la France.

Je remercie pour les réponses circonstanciées à mes questions :
. Amélie Delaroche, Sous-directrice de la lutte contre le terrorisme et la criminalité organisée au MEAE
. Frédéric de Touchet, Chef de mission du Mexique, d’Amérique centrale et des Caraïbes au MEAE
. Jean-Christophe Tallard-Fleury, Sous-directeur d’Amérique du sud au MEAE

« Je partage totalement votre analyse sur les précurseurs chimiques et le Pérou », m’a répondu ce dernier.

VERBATIM de mon intervention

Premier point, le Venezuela. Puisque cela a été mentionné, l’argent du trafic est en dollars, mais pour le blanchir l’or est souvent utilisé par les narcos. Les mines illégales d’or et de diamants pullulent au Venezuela, contrôlées par des organisations internationales criminelles. Que pouvez-vous nous dire sur la situation au Venezuela dans ce domaine et sur le blanchiment du trafic ? Comment est-ce que la France lutte contre ce trafic d’or ?

Ensuite, vous n’avez pas parlé d’un pays en Amérique latine qui est le Pérou et c’est pourtant le deuxième producteur de cocaïne après la Colombie. 70 % des précurseurs chimiques qui servent à la fabrication de la cocaïne sont fabriqués en Chine à bas coûts. Ils sont livrés par conteneurs. Du 1er octobre au 30 octobre 2023, 37 tonnes de précurseurs chimiques ont été saisis en provenance de Chine.

On voit au Pérou des casinos arriver de tous les côtés, tous les 300 à 500 mètres, la plupart tenus par des Chinois qui blanchissent l’argent.

A partir de 2025, au nord de Lima, un port chinois va ouvrir ses portes. La crainte de beaucoup est que tout rentre et sorte par ce terminal chinois.

Que pouvez-vous nous dire de la prise en compte que nous faisons de cette circulation via le Pérou ? Comment est-ce que les organisations multilatérales s’emparent du contrôle sur les précurseurs chimiques qui viennent de Chine ? Quelles pressions diplomatiques exerçons-nous sur ce sujet à l’égard de ce pays ?

J’aurais bien aimé savoir quel est votre avis sur l’évolution du nombre d’assassinats pour 100.000 habitants en Amérique centrale et repositionner ce sujet pour nous donner une perspective par rapport à ce que l’on vit en France. Cela permettra à tous nos compatriotes de bien se rendre compte de la vraie situation à laquelle sont confrontés ces pays du fait d’une criminalité débridée.

CE Narcotrafic – Eurojust – Améliorer la coopération pénale – 22/01/2024 – Vidéo Q/R (5’30)

Ce 22 janvier, notre commission d’enquête sénatoriale sur le Narcotrafic a auditionné Baudoin Thouvenot, inspecteur général de la justice, membre national pour la France du bureau de l’Agence de coopération judiciaire de l’Union européenne (Eurojust).

Créée en 2002, l’agence Eurojust vise à faciliter la coopération pénale au niveau des états membres, auxquels s’ajoutent des états tiers, soit 37 membres au total. Il s’agit d’un « petit conseil européen judiciaire », illustre Baudoin Thouvenot.

Ce sont donc les magistrats nationaux qui saisissent Eurojust dans une volonté de coordonner la coopération, par exemple à travers des demandes d’entraide ou des mandats d’arrêt européens qui posent des difficultés.

J’ai interrogé le magistrat français sur notre coopération avec nos collègues brésiliens face aux petites mains du crime, puis sur l’opacité d’Hong Kong en matière d’enquêtes sur le blanchiment.

VERBATIM de mon intervention

Vous avez mentionné la Guyane et le Brésil. Au Brésil, les gens n’ont pas besoin de visa pour venir quelques jours en vacances en France. Il y a 10 jours, il y a eu un assassinat d’une Brésilienne. Deux personnes ont été arrêtées au moment où elles s’apprêtaient à reprendre l’avion pour le Brésil. Elles ont témoigné, l’une 27 ans, disant qu’elle a trois enfants, une mère malade d’un cancer, que la pluie a détruit sa maison et qu’elle a des dettes. Elle demandait évidemment de comprendre sa situation. L’autre a dit : « j’ai une dette envers une personne qui m’a menacé. Je m’excuse ». On voit bien que ce sont les petites mains du crime qui sont envoyées vers la France et qui sont utilisées, instrumentalisées. Quand j’étais au Brésil, nos collègues brésiliens nous ont dit qu’il fallait qu’on travaille sur ces questions main dans la main, puisque cette problématique, je dirais, représente les deux faces d’une même pièce.

Comment est-ce que vous envisagez de travailler avec vos collègues, par exemple brésiliens, sur ces dossiers ? Est-ce que vous ne pensez pas que ces petites mains doivent aussi être protégées, puisque, c’est ce qu’elles expliquent, on menace leur vie.

Par ailleurs, dans une audition précédente, il nous a été dit que toutes les demandes de notre parquet à Hong Kong revenaient sans réponse. C’est le cas pour les affaires de blanchiment. Je voulais savoir si nous étions le seul pays européen dans ce cas.

CE Narcotrafic – Comment améliorer la coopération policière européenne ? Vidéo Q/R (11′)

Notre commission d’enquête Narcotrafic, présidée par Jérôme Durain, a accueilli (en visioconférence) ce 22 janvier, Jean-Philippe Lecouffe, général de corps d’armée (2S), directeur exécutif adjoint Opérations de l’European Union Agency for Law Enforcement Cooperation (Europol).

Il a rappelé qu’Europol cherchait à apporter de la valeur à ce que faisaient les états membres, sans se poser en concurrent. Son rôle est de plus en plus reconnu hors de l’UE, notamment grâce à ses coopérations avec les pays d’Amérique latine.

J’ai orienté mes questions vers l’organisation d’Europol et les différents fonctionnements au sein de l’UE, le blanchiment par le biais des casinos, la situation du Myanmar, les transferts financiers opaques de la Chine et de Hong Kong et, enfin, les problématiques liées à la compensation.

Je remercie Jean-Philippe Lecouffe pour avoir répondu point par point et, en particulier, le dernier : « Vous avez totalement raison », a répété le général au sujet des compensations qui contournent les échanges d’argent. « On a vu des échanges de produits, armes contre cocaïne, par exemple. C’est quelque chose qu’on surveille de près ».

VERBATIM de mon intervention

Ma première question portera sur la mutualisation des forces de police. On a tous connaissance de la DEA (*) aux États-Unis, de son impact, tant pour l’enquête que pour la réaction. Au niveau d’Europol, quelle est votre vision sur le côté organisation ? Est-ce que Europol est implanté en Amérique latine ?

Lors de nos premières auditions, on a observé des fonctionnements différents au sein de l’union européenne. On a vu qu’à Amsterdam il y avait dans l’aéroport des structures lorsqu’on arrêtait les gens avec des structures éventuellement d’incarcération, des contrôles en amont pour savoir si une personne avait ingéré de la drogue, alors que nous n’avions pas la possibilité de le faire à grande échelle. Est-ce qu’au niveau européen, il y a une forme d’organisation, de réflexion organisée qui se pose dans ce domaine ?

Ensuite, pour le blanchiment, il y a un sujet qui est souvent revenu dans les discussions que j’ai pu avoir avec les forces de police, c’est la question des casinos.
Vous n’avez pas mentionné ce sujet, or on voit certains pays, certaines localisations qui utilisent beaucoup ces casinos qui se positionnent dans les ports, les points de hub de transports. Est-ce quelque chose que vous suivez ?

Ma troisième question traite d’une partie dont vous n’avez pas parlé qui est en Asie, ce que certains appelaient le triangle d’or : Laos, Thaïlande, Birmanie. A Singapour, on m’a répondu que personne n’était capable de dire combien d’argent arrivait de Birmanie, de Myanmar. Est-ce que le Myanmar est un sujet aussi que vous suivez à Europol ?

Enfin, il y a la question des fonds, des investissements qui proviennent de Chine, de Hong Kong. Pour tous ceux qui sont dans la finance, on me dit que tout ce qui vient de Hong Kong, de Chine, est devenu totalement opaque au niveau financier. Est-ce qu’une action est envisagée de la part de l’Europe pour justement pouvoir obtenir des éléments d’information sur les fonds qui arrivent de Chine ?

Et puis, un dernier point, puisque vous avez très bien mentionné et décrit un certain nombre de problématiques liées à la compensation, il y a quelque chose qu’on observe en Afrique et qui se développe, c’est l’approvisionnement d’équipements informatiques, télécoms qui sont achetés par la monnaie locale et qui arrivent directement dans des containers qui passent sans déclaration et c’est une façon aujourd’hui de compensation : il n’y a pas que de l’argent d’un côté, de l’argent de l’autre, c’est parfois aussi des produits et cela rend les choses très complexes, comme vous l’avez dit, mais c’est aussi un sujet à mon avis de procuration, de triangulation pour le blanchiment. Merci

(*) Drug Enforcement Administration (DEA)

CE Narcotrafic – Guyane : l’avis des maires sur le scanner et contrôle de la frontière terrestre – Vidéo (7’50)

Dans une série d’auditions consacrées à la situation en Guyane, notre commission d’enquête Narcotrafic, présidée par Jérôme Durain, a donné la parole aux maires, ce 20 décembre.

L’occasion de revenir notamment sur la technique du scanner à rayons X, applicable à tous les passagers, qui me paraît être une solution pour empêcher le transport de drogues par les passagers.

Cette démarche semble faire ses preuves au Suriname pour éradiquer le phénomène des « mules ».

Je remercie Jean-Claude Labrador, maire de Roura en Guyane, puis Michel-Ange Jérémie, maire de Sinnamary et président de l’Association des maires de Guyane d’avoir partagé cette information.

VERBATIM de mon intervention

“Dans le développement du trafic, on nous a signalé la présence de factions brésiliennes en prison à Cayenne, est-ce-que cela ne pourrait pas expliquer le fait que, justement, des jeunes ressortent de prison comme s’ils avaient été recrutés, c’est ce qu’on peut observer par exemple pour le terrorisme ?

A la différence des Antilles, vous avez une frontière terrestre difficile à contrôler. Une audition précédente parlait de Manaus comme plaque tournante de la drogue qui arrivait de Colombie ou du Pérou. Est-ce que la porosité de la frontière avec le Brésil ne facilite pas le trafic et quelles sont vos observations sur les trafics venant du Brésil et que pourriez-vous préconiser ?

Je voudrais être sûr que, lorsque vous parlez du Suriname, vous parlez bien des systèmes de rayons X qui permettent de détecter la drogue dans les aéroports pour scanner tous les passagers, puisqu’on en a parlé dans une audition. Je voudrais être sûr que c’est bien ce système dont qu’ils disposent au Suriname et qui pourrait mériter une évolution législative pour qu’on puisse l’imposer”.

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En réponse, Jean-Claude Labrador a été clair : « L’appareil qui détecte la drogue au Suriname a beaucoup fait diminuer le trafic ». C’est pour le maire « la façon la plus efficace de réduire, voire d’annihiler le trafic de drogue en Guyane. Au Suriname, ils ont mis les moyens et c’est réglé. Le 100% contrôle une très bonne chose ».

CE Narcotrafic – Guyane : l’avis de la justice pour contenir le flot de “mules” au départ de Cayenne – Vidéo (4’15)

La commission sénatoriale Narcotrafic, présidée par Jérôme Durain, a organisé une série d’auditions, le 20 décembre, au sujet de la situation en Guyane.

A l’écoute des divers témoignages, je ne peux me résoudre à penser que notre dispositif de contrôle, lors de l’embarquement, au départ de Cayenne ne permette d’intercepter qu’une petite minorité de « mules » qui font passer de la drogue dans l’Hexagone.

J’ai proposé la solution du scanner, comme observé dans d’autres pays.

VERBATIM de mon intervention

“Pour compléter ce que vient de dire ma collègue, c’est vrai qu’on n’imagine pas que 50 terroristes puissent se présenter avec des explosifs devant un avion et qu’on puisse en arrêter seulement quelques-uns, au motif qu’on est débordé ! Voilà qui mettrait en péril la sécurité de l’avion.

Ce système avec un nombre de mules qui déborde nos services et ça passe, c’est un peu déroutant, je pense que vous pouvez le comprendre. Certains nous ont parlé d’un système qui permette de voir automatiquement si de la drogue était ingérée.

On voit qu’aux Antilles, cela nous a été dit hier, ce phénomène se développe. Donc, cela prend du temps une fois qu’on arrête quelqu’un qui a ingéré de la drogue : il faut effectivement des moyens médicaux pour accompagner, donc tout prend énormément de temps, on le comprend, mais ne pensez-vous pas que, justement, la solution ce soit d’avoir un système qui permette de contrôler tout le monde pour voir qui a ingéré de la drogue, avant de monter dans l’avion et de le stopper à cet endroit-là.

Parce que c’est difficilement audible pour nous dans l’Hexagone de se dire que nous avons X personnes qui montent dans chaque avion parce qu’on n’est pas capable d’arrêter tout le monde.

Il y a bien une question de process qu’il faut mettre en place pour voir comment arrêter ce flot.”

– – –

Dans sa réponse, Yves Le Clair, procureur de la République près le tribunal judiciaire de Cayenne a raconté qu’un contrôle de 100% des passagers avait été réalisé, à titre d’essai, sur 2 vols de Fort de France. Au résultat : sur 150 passagers, il y avait 10 mules dans chaque vol…

Mais le procureur écarte la solution au motif du scanner pour tous au départ, qu’elle exige trop de temps et impose une structure médicale. Il admet néanmoins « la pertinence du scanner » non pas au départ mais à l’arrivée, sur le modèle néerlandais. Il faudrait donc installer des scanners sur les aéroports parisiens, où nous pourrions prendre le temps de faire les contrôles.

CE Narcotrafic – Martinique et Guadeloupe : l’avis de la Justice – Vidéo Q/R (vidéo 1’47)

Dans le cadre d’une série d’auditions concernant les Antilles, réalisées par la commission d’enquête sénatoriale sur les narcotrafics, nous avons recueilli l’analyse des magistrats de Pointe à-Pitre et Fort-de-France.

J’ai porté la question sur la responsabilité de élus locaux et leur idée d’armer la police locale.

Je remercie Clarisse Taron, procureure de la République près le tribunal judiciaire de Fort-de-France, pour sa réponse précise à mes interrogations.

VERBATIM de mon intervention

Vous avez évoqué la difficulté d’avoir des connections avec les élus locaux sur les questions de sécurité qui ne seraient, d’après vous, pas très intéressés par ces questions. En fait, lors de la première audition, ils ont quand même fait valoir toute la problématique liée à l’insécurité montante, avec justement l’armement des gangs clairement identifiés et qui sont visibles. Ils nous ont parlé d’une volonté d’armer la police locale du fait du développement de la violence. Est-ce que vous ne pensez pas que cela serait susceptible de créer une escalade ?

CE Narcotrafic – Martinique et Guadeloupe : l’avis des forces de l’ordre – Vidéo Q/R (9’36)

Présidée par Jérôme Durain, notre commission d’enquête sénatoriale Narcotrafic a entendu, ce 18 décembre, les forces de sécurité – police, gendarmerie et douanes – afin nous éclairer sur l’état de la menace globale sur la zone Caraïbes, complété par un focus sur le territoire de Guadeloupe.

Les iles françaises aux Antilles avec la Guyane sont les territoires les plus proches des zones de production de cocaïne. Nulle surprise que la Martinique et la Guadeloupe notamment, constituent depuis longtemps des zones de transit.

Pour la Guadeloupe la dernière “ile rebond” pour l’arrivée des armes, des stupéfiants et des étrangers en situation irrégulière sur le territoire, c’est la Dominique.

VERBATIM de mon intervention

Il nous a été dit précédemment qu’il n’y avait qu’une seule frégate et que lorsqu’elle était en vue, entre la Guadeloupe et la Dominique, le trafic s’interrompait. Et dès qu’elle partait… ça redémarrait. Je voulais savoir si effectivement les moyens que vous envisagez étaient pour permettre une surveillance permanente de ce couloir qui apparemment est le plus utilisé.

Vous avez fait valoir qu’il y avait sept fois plus d’homicides que dans l’Hexagone. C’est impressionnant, mais j’aimerais savoir par rapport aux îles environnante quel est notre taux ? Est-ce-que ce taux d’homicides est supérieur ou inférieur par rapport aux îles environnantes pour savoir comment on se positionne dans l’environnement immédiat.

Et, enfin, il y a une réflexion qui a été faite par un maire précédemment qui disait que du fait de la peur qui commençait à naître, les gens préféraient fermer leurs fenêtres pour ne pas être un témoin potentiel du trafic. Ils envisageaient la possibilité d’armer la police locale du fait du développement de la violence. Je voudrais savoir ce que vous pensez de cette idée ? Est-ce que vous ne pensez pas que cela pourrait provoquer une escalade ? Là aussi, en comparaison avec ce qui se passe sur les îles alentour.

CE Narcotrafic : les paradis bancaires, trous noirs du blanchiment – Vidéo Q/R (6’50)

La commission d’enquête Narcotrafic a organisé une table ronde réunissant journalistes et experts, ce 18 décembre au Sénat.

Je suis intervenu sur la question du blanchiment d’argent lorsqu’il est organisé avec la complicité active de certains états. Dès lors, toute velléité de poursuite des narcotrafiquants se heurte à un mur infranchissable.

Bertrand Monnet, professeur à l’École des hautes études commerciales (EDHEC) a qualifié de trous noirs les paradis bancaires existant dans certains pays. Ceux-ci accueillent des fraudeurs fiscaux tout autant que des entreprises parfaitement légales qui font ce qu’on appelle hypocritement de l’optimisation fiscale, précise-t-il. Évoquant ces états peu coopératifs, y compris en Europe comme le Monténégro, il a raconté que « les ingénieurs en blanchiment d’argent » conseillaient aujourd’hui aux narcotrafiquants de « passer par Hong-Kong », du fait de la mainmise de la Chine sur l’Ile qui est devenue « le trou noir des trous noirs »…

M. Monnet a conclu que nous n’avions pas encore la solution pour faire tomber ce mur d’opacité.

VERBATIM

Vous avez parlé d’une expérience que vous avez partagée sur le blanchiment à Dubaï. La problématique quand on se heurte aux questions de blanchiment, c’est qu’on se heurte en fait au carrefour de tous les trafics, parce que beaucoup cherchent à blanchir pour contourner les sanctions économiques. La Russie pour contourner les sanctions économiques utilise aussi ces réseaux et toute notre difficulté effectivement c’est d’essayer de regarder comment tout cela fonctionne.

Dès qu’on rentre sur la question du blanchiment on se confronte au financement du terrorisme, on retrouve tous ces circuits.

Vous n’avez pas mentionné le Venezuela qui est une sorte d’autoroute entre la Colombie et les Antilles qui justement aussi aide beaucoup à blanchir l’argent pour financer simplement l’état qui est sous sanctions.

On parle des plateformes, on parle de Dubaï, c’est Christophe Perrueux (*) qui a dit qu’il n’y a plus de réponse de la part de Hong-Kong et que cela bloquait toutes les enquêtes. Nous sommes donc en train de nous rendre compte que, dans ce domaine, effectivement on se heurte à un mur, puisqu’il y a des gens, des nations qui ont un intérêt convergent avec cette industrie de la drogue.

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(*) Christophe Perrueux : directeur du Service d’enquêtes judiciaires des finances (SEJF).
Lire : CE Narcotrafic – Présomptions de blanchiment : Hong Kong ne répond plus… du 11/12/2023

CE Narcotrafic : Utiliser l’intelligence artificielle pour repérer automatiquement les véhicules des trafiquants – Vidéo Q/R (2’)

Afin d’étudier « l’impact du narcotrafic en France », notre commission d’enquête, présidée par Jérôme Durain, a interrogé le général de corps d’armée, Tony Mouchet, adjoint au major général de la Gendarmerie nationale, au Sénat, ce 27 novembre.

Après avoir questionné le général sur les têtes de réseaux qui poursuivaient leur action après leur incarcération, notamment en Guyane (compte-rendu), j’ai rebondi sur sa volonté d’interconnecter les LAPI (lecteurs automatiques de plaques d’immatriculation) en service en France.

J’ai suggéré de nous inspirer de la police de la route brésilienne qui utilise l’intelligence artificielle pour récupérer les données des LAPI et repérer automatiquement les trafiquants potentiels dans les flux de circulation routière.

Une perspective qui ravirait le général.

VERBATIM de mon intervention

Je voudrais soutenir le LAPI, Lecteur automatique des plaques d’immatriculation. Au Brésil, la police sur la route est devenue la plus performante, grâce à un système qui lui permet de voir automatiquement toutes les plaques en circulation. L’intelligence artificielle permet de mettre des « drapeaux » sur des comportements qui sont potentiellement suspects. En fonction de la couleur du drapeau, ils font intervenir différentes forces. Le véhicule apparaissant comme suspect n’est donc pas arrêté au hasard. Cela a permis de faire progresser la lutte contre les trafics. On pourrait préconiser cet outil avec la commission d’enquête, je pense que cela nous ferait faire de grands progrès.

CE Narcotrafic – Présomptions de blanchiment : Hong Kong ne répond plus… Vidéo Q/R (4’45)

Ce 11 décembre, la commission d’enquête sénatoriale pour étudier « l’impact du narcotrafic en France », présidée par Jérôme Durain, s’est réunie sur ce thème : le service d’enquêtes judiciaires des finances : quel bilan ?

A ce titre, nous avons invité Christophe Perruaux, directeur du Service d’enquêtes judiciaires des finances (SEJF).

En réponse à ma question sur certaines places financières, aussi accommodantes avec les flux financiers douteux que peu coopératives au regard de nos investigations, Christophe Perruaux a constaté : « Pour nous cela se traduit par une non-réponse aux questions que l’on pose, cela peut effectivement mettre fin à une enquête après une demande d’entraide ou plus exactement une commission rogatoire. Par exemple, on sait qu’aujourd’hui Hong Kong ne répond plus…»

Verbatim de mon intervention

Dans le complément de ce que vient d’évoquer mon collègue, j’étais à Panama il n’y a pas très longtemps où justement il y a tout un enjeu, puisque c’est un pays de transit des stupéfiants et ils sont donc conscients de la problématique. Les autorités font justement de la lutte contre le crime organisé une priorité.

On avait parlé de dispositions législatives pour connaître les bénéficiaires finaux des entreprises. Je crois qu’il y a une quarantaine de cabinets d’avocats qui gère à peu près 150.000 sociétés. On peut imaginer la problématique pour connaître le bénéficiaire final de chacune des sociétés.

La problématique que je vois est celle des états qui contournent les sanctions économiques, qui utilisent ces réseaux. Cela fait beaucoup d’argent qui passe. Ces systèmes se confondent évidemment avec le trafic de drogue.

Donc, comment appréhendez-vous le sujet ?  J’ai évoqué Panama sans les accuser, mais on pourrait parler d’autres États. Vous avez mentionné Dubaï, on pourrait parler de Singapour ou de Hong Kong. Il y a donc un certain nombre de places financières, dont certains s’accommodent.

Comment donc envisagez-vous les enquêtes dans ces cas-là ? Par rapport à ces pays peu coopératifs où en êtes-vous dans vos enquêtes ? Est-ce que vous arrivez à faire la part des choses ?
Un des vrais sujets qui se pose et qui va se poser de plus en plus, c’est la présence de ce qu’on peut qualifier de narco-États. Des États qui ont pourtant pignon sur rue, qui siègent à l’ONU, qui facilitent le trafic de drogue, y compris sa financiarisation. Est-ce que vous voyez ce phénomène se développer ? Est-ce qu’il y a des États qui vous posent aujourd’hui problème ?